ni cap, ni grand canyon
créé pour le Ballet de l'Opéra de Lyon
et présenté dans le cadre de la soirée "Double Jeu"
composée également de "Mauvais Genre" d'Alain Buffard.

chorégraphie, scénographie et costumes : christian rizzo
assisté de : sophie laly
musique originale, jouée en direct par didier ambact
lumières: caty olive
création mondiale le 9 juin 2009 par le Ballet de l’Opéra de Lyon
pièce pour 11 danseurs :
Cédric Andrieux, Fernando Carrion Caballero, Maité Cebrian Abad, Harris Gkekas, Caelyn Knight, Coralie Levieux, Karline Marion, Jérôme Piatka, Jaime Roque De La Cruz, Denis Terrasse, Agalie Vandamme
durée : 40 mn


Le Ballet de l’Opéra de Lyon termine souvent ses saisons sur des paris audacieux : tout en demeurant fidèle à ses auteurs de prédilection – de Maguy Marin à Trisha Brown, de William Forsythe à Jirí Kylián et Mats Ek – dont il s’emploie avec bonheur à approfondir la pratique, il cherche à élargir son répertoire et ne craint pas de s’aventurer dans des domaines plus expérimentaux : ainsi pour ce “Double Jeu“ avec Alain Buffard et Christian Rizzo.
Personnalités singulières du paysage de la danse contemporaine française, Alain Buffard et Christian Rizzo sont les “performers“ d’une danse qui s’inscrit dans une réflexion globale sur le spectacle, la scène ritualisant le corps et ses modes de socialisation.

Plasticiens quelque peu “bricoleurs“, ils n’hésitent pas à affubler leurs danseurs de diverses “prothèses“, les transformant en créatures mutantes.
Mais si Christian Rizzo aime le masque et le travestissement, l’artifice et les métamorphoses, Alain Buffard leur préfère le dépouillement et le réalisme de la mise à nu. Dans ce jeu à l’érotisme distancié, le but semble le même : interroger le spectateur
et son regard sur l’autre, bousculer les certitudes, brouiller les sensations, et en définitive défier la mort qui agresse sans cesse vos vies.
Inéluctablement.
Josseline Le Bourhis pour l’Opéra de Lyon


« En amont de cette nouvelle création avec les danseurs du Ballet de l’Opéra de Lyon, je n’avais pas de proposition spéciale. Je gardais de ma première collaboration sur ni fleurs, ni ford-mustang le souvenir de leur bagage technique impressionnant, qui nous avait permis de faire des improvisations intéressantes.
Et je reviens à Lyon, sans inquiétude. Les onze danseurs choisis (six garçons et cinq filles) forment un “groupe désirant“.
J’ai donc pu tenter une autre approche, en ne travaillant pas sur les objets ni les costumes, d’où le titre transposé de cette pièce, en écho à celui de la création de 2004 : ni cap, ni grand canyon.
Je me suis concentré sur l’écriture chorégraphique, et les corps en mouvement, répondant à la musique tout en rythmes et percussions de Didier Ambact, qui sera jouée en direct.
Cette fois, je ne cherche pas à créer les images d’un univers onirique, mais à réaliser ce que j’appelle une “abstraction fictionnelle“.
La danse, de toutes façons, ne peut être totalement abstraite, puisque les corps des danseurs sont bien présents, mais ma danse ne racontera rien, elle suggèrera seulement, à partir du quotidien.
Les danseurs sont vêtus à l’ordinaire, ce qui m’autorise à essayer l’unisson, la façon d’uniformiser les individus pour les fondre dans un groupe, puis les différencier.
Je construis ma chorégraphie avec les danseurs au jour le jour, comme on rédige un journal intime. Elle se révèle au fur et à mesure du travail. C’est une expérience passionnante que je n’avais encore jamais faite, et j’en remercie le Ballet de l’Opéra de Lyon ».
Christian Rizzo
Propos recueillis par JLB, mai 2009 pour l’Opéra de Lyon

« Le plateau est pour moi un espace de passage ritualisé. Je l’aborde toujours comme le lieu de la transformation, usant de la “forme“ pour tenter chaque fois de laisser apparaître, plutôt que de vouloir montrer.
En général, les artistes observent le monde pour créer des formes. Pour moi ce serait plutôt l’inverse : les formes que je crée m’aident à regarder le monde. »
Christian Rizzo

« On est servi avec la création de Rizzo. Sur le plateau pas de décor, mais un podium massif pour le batteur Didier Ambact.
La danse joue des entrées et des sorties, mouvante, volontairement peu repérable. Après un travail plastique pour ce même ballet en 2004, il présente ici une pièce très chorégraphique, complètement investie par les interprètes.
Et cela prend, chez lui, toujours comme par une magie contagieuse, à retardement.
C’est sans doute son habileté à sculpter l’espace, à lui créer des volumes, qui rend cette pièce si délicate, la danse presque silencieuse partageant le plateau avec la musique richement percussive. »
Liberation, 12 juin 2009